‘Bonjour Adeline, ma question est sur la PrEP. Je remarque que de plus en plus de personnes organisent des gangbangs en demandant du naturel, du creampie et sans (forcément) exiger de tests. Certes elles sont sous PrEP donc protégées pour le VIH, mais pas pour le reste des MST. Mon interrogation est pour les hommes. Si l’un des prétendants est porteur du VIH, les suivants risquent-ils de l’attraper aussi ? Pour moi oui, la souche reste active et contagieuse. Si je me trompe, merci de clarifier, je pense ne pas être le seul à m’interroger’.
Merci pour cette question, qui est précieuse et qui intéressera sûrement beaucoup de monde. Le libertinage et la PrEP sont des sujets dont on parle de plus en plus, mais souvent avec des idées fausses ou incomplètes. La PrEP est une avancée formidable contre le VIH, mais elle ne règle pas tout, surtout lorsqu’il s’agit de pratiques multiples comme les gangbangs ou les rencontres libertines. Ensemble, faisons le point pour comprendre les vraies protections et les limites.
LA PREP: UNE PROTECTION CIBLÉE, PAS UNIVERSELLE
La PrEP, prise correctement et régulièrement, protège de manière très efficace contre le VIH. C’est un outil révolutionnaire qui a permis à beaucoup de personnes de vivre leur sexualité avec plus de liberté et moins d’angoisse, mais il est important de rappeler que la PrEP ne protège que du VIH. Elle ne fait rien contre les autres infections sexuellement transmissibles: syphilis, gonocoque, chlamydia, hépatites, papillomavirus,… Toutes ces IST se transmettent encore très facilement lors de rapports non protégés, surtout lorsqu’il y a plusieurs partenaires.
MON CHOIX PERSONNEL FACE À LA PREP
Je tiens aussi à partager un point personnel, car je crois qu’il est important d’être transparente. Pour ma part, je ne prends pas la PrEP. Non pas parce que je la juge inutile – au contraire, c’est une avancée remarquable -, mais parce que j’ai peur de ses effets secondaires sur le long terme. Comme tout médicament pris régulièrement, elle peut provoquer des troubles digestifs, des maux de tête, une atteinte rénale ou osseuse chez certaines personnes, même si ces cas restent minoritaires je préfère écouter mon ressenti et ne pas la prendre.
C’est un choix intime, propre à mon corps et à mon rapport à la santé, mais ce choix implique aussi que je dois être encore plus attentive à mes pratiques. J’assume de miser davantage sur d’autres moyens de prévention: le préservatif, qui reste une protection efficace et simple, et les dépistages réguliers, que je considère comme un geste de soin autant pour moi que pour mes partenaires.
Ce n’est pas une décision que je présente comme un modèle universel, mais comme un exemple de liberté et de responsabilité. Chacune et chacun peut décider de la stratégie de prévention qui lui correspond, à condition d’en connaître les limites et d’agir en conscience.
LIBERTINAGE ET TRANSMISSION EN CHAÎNE
Dans un gangbang, mais aussi lors d’une soirée libertine où les partenaires se succèdent, les fluides corporels circulent d’une personne à l’autre.
- Si une femme ou un homme séropositif/ve est sous traitement efficace, sa charge virale peut être indétectable, et donc non transmissible. C’est une excellente nouvelle et un vrai progrès médical.
- Mais si la personne n’est pas sous traitement, le virus présent dans le sperme ou les sécrétions reste actif. Les partenaires suivants peuvent alors être exposés.
- Et même si l’on met de côté le VIH, il reste tous les autres microbes: chlamydia, gonocoque, mycoplasmes, papillomavirus, hépatites,… qui, eux, circulent sans qu’on s’en rende compte et se transmettent d’un(e) partenaire à l’autre.
Dans un cadre collectif, le risque se multiplie, car il y a plus de partenaires, plus de fluides, et donc plus de possibilités de transmission.
LE RISQUE ZÉRO N'EXISTE PAS
On entend souvent: ‘Pas d’inquiétude, je suis clean, j’ai fait un test il y a deux semaines‘. Cette phrase rassure sur le moment, mais en réalité elle ne veut pas dire grand-chose.
Chaque infection a sa propre période d’incubation, aussi appelée ‘fenêtre sérologique’. C’est le laps de temps entre la contamination et le moment où elle devient détectable par un test. Ce délai varie énormément, quelques jours pour certaines infections comme la gonorrhée, plusieurs semaines pour la syphilis, et parfois jusqu’à trois mois pour le VIH.
Concrètement, une personne peut avoir été contaminée juste après son dernier dépistage et continuer à transmettre une IST sans le savoir. Le résultat affichera ‘négatif’, alors qu’elle est déjà porteuse et contagieuse.
C’est pour cela que le risque zéro n’existe jamais, même si chacun(e) se présente avec des tests récents. Le dépistage reste un outil précieux, mais il ne peut pas, à lui seul garantir une sécurité totale. Dans un contexte libertin, où les partenaires changent et se multiplient, cette réalité doit être intégrée dans la gestion de sa sexualité et de ses choix de protection.
COMMENT RÉDUIRE LES RISQUES
Le libertinage est une liberté merveilleuse, mais c’est aussi une responsabilité. Pour se protéger et protéger les autres, plusieurs outils existent:
- Le préservatif: il reste la meilleure protection contre la majorité des IST, même si ce n’est pas toujours le choix préféré, il permet de réduire considérablement les risques.
- Les dépistages réguliers: indispensables. Les faire seul(e), mais aussi en parler avec ses partenaires, car c’est un acte de soin partagé.
- La PrEP: un outil précieux pour celles et ceux qui veulent se protéger spécifiquement du VIH, mais qui doit être complété par le reste.
- La communication: poser clairement ses envies, ses limites et ses conditions. Mieux vaut une conversation un peu gênante que des conséquences lourdes ensuite.
EN RÉSUMÉ
La PrEP est une avancée majeure, mais elle n’est pas une baguette magique. Elle protège du VIH, oui, mais pas des autres IST. Dans le cadre du libertinage, que ce soit un gangbang ou une rencontre à deux, les pratiques ‘naturelles’ comportent toujours un risque, même si tout le monde se dit testé(e).
Pour aller plus loin, tu trouveras d’autres explications dans le guide que j’ai créé: Infections sexuellement transmissibles – ce qu’il faut vraiment savoir.